A-PROPOS
QUI SOMMES NOUS ?

Au début du siècle dernier, plusieurs événements précipitèrent l’Empire russe dans la tourmente : d’abord la calamiteuse guerre russo-japonaise, puis la Première Guerre mondiale, suivie de l’abdication de l’Empereur Nicolas II, conséquence d’un complot sur fond de manifestations que l’on nomme révolution de Février. Enfin survint un putsch, mené par un groupe d’individus arrivés en Russie à l’initiative du ministre des Affaires étrangères et de l’état-major allemand. Ce putsch, que l’on appelle révolution d’Octobre, eut pour but de renverser le gouvernement Kerenski, un socialiste révolutionnaire.
La plupart des acteurs de la révolution de Février, dont les généraux que l’on appelle encore aujourd’hui, bien curieusement, « généraux tsaristes », s’opposèrent à la révolution d’Octobre. La Russie sombra alors dans une sanglante guerre civile, perdue par les opposants. Plus d’un million de personnes choisirent l’exil : il s’agissait non seulement de l’élite — hommes politiques, artistes, écrivains, militaires, cosaques — mais aussi d’agriculteurs1, d’ouvriers et d’artisans2, de petits commerçants3.
Ces exilés, je les ai bien connus dans mon enfance, surtout les militaires. Nous vivions à Paris, dans le 15ᵉ arrondissement, un quartier construit dans les années 1930. Notre appartement minuscule faisait face à l’église orthodoxe de la Présentation de la Vierge au Temple, où le père Viktor m’enseignait le catéchisme. J’ai appris, longtemps après, qu’il s’agissait du colonel Viktor Andréïevitch Yourieff, commandant du train blindé « Vpériod za Rodinou »4, puis du « Sevastopolets ». J’ai découvert aussi que le parrain de mon frère, Nikolaï Ivanovitch Zimine, était colonel des cosaques du Tersk. Au-dessus vivait Gueorgui Alexéevitch Karpoff, un cosaque. On se moquait gentiment de lui, ce « paysan militaire ». Quelle ne fut pas ma surprise en découvrant qu’il avait fréquenté la plus prestigieuse école militaire de Russie : le Corps des Pages.
Ce n’est que longtemps après leur disparition que j’ai découvert qui ils étaient réellement et que je me suis passionné pour leur histoire.
Mon père et ma mère étaient tous deux enfants d’officiers de la Marine impériale. Ils se rencontrèrent au Cercle de la Marine impériale de Paris. La plupart de leurs amis étaient eux-mêmes officiers de marine ou descendants d’officiers. Du côté maternel, l’histoire familiale était bien connue, mais du côté paternel, mon père avait perdu le sien à l’âge de huit ans : la mémoire familiale n’avait donc pas été transmise. Il m’a fallu prendre mon bâton de rétro-pèlerin et remonter le temps pour la reconstituer. Ce long voyage a duré plus de vingt ans — mais quel voyage ! Avec de nombreuses rencontres étonnantes, dont celles de Tenguiz Khan et de Riourik5, dont je descends par les femmes.
Tout au long de ce périple, j’ai cherché à comprendre le contexte de la vie de ces personnages et j’ai dû lire des montagnes de livres pour retrouver un nom, un événement. Par la suite, et pendant des années, j’ai participé et aidé du mieux que je pouvais des historiens russes dans la rédaction d’ouvrages consacrés à l’histoire de la marine. J’ai également accompagné des dizaines de personnes dans la reconstitution de la biographie de leurs ancêtres, marins, militaires de l’armée de terre ou cosaques.
Dans ce blog, je compte présenter, sans ordre particulier, des articles sur des sujets qui me tiennent à cœur, partager des informations variées, des photographies en lien avec l’objet du blog. Je me tiens à votre disposition pour tenter de répondre à vos questions dans le cadre de cette thématique.

- Emigration russe dans les Balkhans 1920 – 1940. Miroslav Iovanovitch. A Constantinople le 26 octobre 1920 : 17,4 % ↩︎
- Ibid. A Constantinople le 26 octobre 1920. Respectivement 4,2 % et 3 % ↩︎
- Ibid. A Constantinople le 26 octobre 1920 : 1 % ↩︎
- Train blindé « En avant pour la patrie » pris aux rouges à Tikhoretskaya en juillet 1918, abandonné lors de l’évacuation de Novorossiisk à Touapsé, mais l’armement a pu être démonté et remonté sur le Sevastopolets » en Crimée (Armée russe de Wrangel). ↩︎
- Riourik, prince varègue (Viking), est à l’origine des Riourikides, dynastie qui régna sur la Russie Kiévienne puis la Moscovie. ↩︎